Le gouvernement des nulos en économie: on est au bord de la récession, faire des coupes budgétaires c'est le truc à ne pas faire et eux ils foncent tête baissé dans le désastre …
Le mur budgétaire de 2025 se rapproche. Pour trouver des économies inédites, le chef de l’Etat et son Premier ministre n’ont pas d’autres choix que de s’attaquer au sujet
Gabriel Attal, lors de son discours de politique générale à l’Assemblée nationale, le 30 janvier dernier.
Réduction de la durée d’indemnisation du chômage, désindexation des retraites, économies sur les dépenses de santé, les pistes explorées sont nombreuses. Et explosives.
DIX MILLIARDS DE COUPES dans les dépenses de l’Etat par décret, ce n’était qu’un apéritif ! Une mesure d’urgence pour tenir la réduction du déficit programmée pour 2024 sans passer devant le Parlement et risquer une motion de censure. « Cela représente moins de 0,5% de la dépense publique, souligne un conseiller du pouvoir. C’est une étape, pas une finalité ». Un euphémisme.
Car, si la prévision de croissance a été revue à la baisse pour 2024, de 1,4% à 1%, celle de l’année prochaine est aussi obsolète. Elle devrait être loin de la cible de 1,7%. Et qui dit moins de croissance, dit moins de recettes. Il va donc falloir trouver beaucoup plus que 12 milliards d’économies. Le président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, qui a une petite expérience de Bercy, a déjà prévenu : « Le budget 2025 sera d’une importance sans doute inédite ». Si les objectifs de réduction des déficits ne sont pas atteints, la dette française va continuer à progresser après avoir bondi de moins de 98% avant la crise Covid à plus de 111% du PIB. Avec le risque qu’elle ne cesse d’enfler.
Taxation. Jusqu’à présent, Emmanuel Macron et Bruno Le Maire ont résisté aux hausses d’impôts, même si les « aides aux entreprises » sont dans le viseur. « La solution qui consistera à augmenter l’impôt des riches, c’est-à-dire, en réalité, des classes moyennes, suscitera leur exaspération légitime », martèle le ministre des Finances, même s’il pousse le sujet d’une taxation plus forte des milliardaires au niveau mondial.
Reste à trouver de telles économies. Sur l’Etat ? Oui, mais les lois de programmation sectorielles pluriannuelles empilées par Emmanuel Macron depuis 2017 représenteront « 31% des dépenses de l’Etat en 2027 », rappelle la Cour des comptes. L’augmentation programmée des budgets de la Défense, de la Justice ou pour la sécurité intérieure, va contraindre les dépenses des autres ministères à diminuer comme jamais.
Quant aux collectivités locales, aux mains des oppositions, il est de plus en plus difficile de les contraindre. Reste… les dépenses de protection sociale, le plus gros morceau des dépenses publiques. En 2021, elles atteignaient 34% du PIB, un record en Europe. Elles dépassaient surtout 56% de la dépense
publique totale en 2022.
Sur les 12 milliards d’économies pour l’instant assumées pour 2025, le gouvernement a promis de trouver une moitié sur l’Etat, et l’autre sur les dépenses sociales… « Notre projet, c’est de faire moins de redistribution et plus de production », explique depuis des mois Bruno Le Maire.
Une ligne totalement assumée par Gabriel Attal depuis son arrivée à Matignon. La liste des pistes d’économies mises sur la table ces derniers jours est impressionnante. Le Premier ministre veut d’abord reprendre le dossier de l’assurance chômage des mains des partenaires sociaux, qui ont prévu de discuter de l’emploi des seniors jusqu’au 26 mars. Il souhaite acter, dans la foulée, une quatrième réforme de l’assurance chômage depuis 2017, pour inciter encore davantage à une reprise rapide d’emploi.
« On est passé de vingt-quatre à dix-huit mois de durée d’indemnisation, on peut encore la réduire. On peut aussi accentuer la dégressivité des allocations, cela fera partie des discussions », a-t-il expliqué ce week-end au Journal du Dimanche. « Cela fait partie des réformes les plus puissantes pour faire baisser le chômage. Soit on veut atteindre le plein-emploi, soit on ne le veut pas », justifie un conseiller du pouvoir. En privé, Bruno Le Maire avait évoqué le passage de dix-huit à douze mois. « C’est peut-être un peu raide », concède le même.
Une telle réforme peut-elle s’ajouter à des mesures spécifiques sur l’emploi des seniors ? Parce qu’elle est exprimée en pourcentage de la durée d’indemnisation, une nouvelle réduction diminuerait davantage le nombre de mois indemnisés de cette catégorie. Reste que ce nouveau tour de vis sur l’assurance chômage apparaît contraire à la « contracyclicité » qui avait présidé à la précédente réforme : l’indemnisation devait être raccourcie en cas de baisse du chômage et rallongée en cas de hausse. Or, le taux de chômage a commencé à remonter pour atteindre 7,5% fin 2023. Mais on reste encore loin du seuil fixé pour étendre les droits, établi à 9%...
Pré-retraites. Gabriel Attal devrait aussi acter la fin des « pré-retraites Unedic », un dispositif grâce auquel un chômeur indemnisé à l’âge légal de départ à la retraite peut bénéficier du maintien de ses allocations tant qu’il n’a pas atteint l’âge d’annulation de la décote. Selon l’Unedic, trois allocataires sur dix âgés de 62 ans ou plus étaient concernés mi-2022. Soit entre 70 000 et 80 000 personnes, dont 20 600 ont théoriquement épuisé leurs droits initiaux à indemnisation. Facture : 400 millions d’euros par an. « Peu présent dans le débat public, ce dispositif pèse fortement dans les négociations de fin de carrière dans les entreprises, en particulier dans les plus grandes », soulignait le Conseil d’analyse économique dès 2016. « C’est une belle trappe à inactivité ! », insiste un conseiller.
En matière de chômage, l’exécutif explore une autre piste explosive. La CSG sur les chômeurs pourrait être augmentée. Ces derniers bénéficient d’un taux réduit, progressif en fonction du montant des indemnités touchées, jusqu’à 6,2% contre 9,2% pour les salariés. « Beaucoup de demandeurs d’emploi sont exonérés. Le taux effectif moyen sur les allocations chômage est de 2% », pointe-t-on dans les allées du pouvoir.
Symboliquement, cette mesure peut être présentée comme un financement des 2 milliards d’euros de baisse de prélèvements en faveur des classes moyennes qui travaillent. Gabriel Attal a fait de leur défense sa marque de fabrique. La hausse de la CSG pour les chômeurs s’ajouterait alors à la suppression surprise, déjà annoncée par le Premier ministre lui-même, de l’allocation de solidarité spécifique pour les chômeurs en fin de droits. Elle sera remplacée par le RSA.
En matière de ballon d’essai, les retraites ne sont pas épargnées. Et pour cause : elles pèsent, à elles seules, 25% des dépenses publiques. Interrogé à ce sujet sur France Inter, le ministre délégué au Budget, Thomas Cazenave, n’a pas exclu une forme de sous revalorisation des pensions par rapport à 2025. « On aura ce débat pour le budget 2025 […]. Est-ce qu’on continue à indexer l’ensemble de nos prestations, l’ensemble de nos transferts ? », s’est-il interrogé.
Santé. Le sujet est explosif, tant les retraités ont soutenu l’élection du Président. Mais la revalorisation des retraites de base de 5,3% a coûté 14 milliards en 2024. Ce ne serait pas si nouveau. En 2018, Edouard Philippe s’était résolu à annoncer une sous-revalorisation des pensions et des prestations pour faire des économies avant la crise Covid.
Reste le dernier éléphant dans la pièce : la santé. Avec le vieillissement de la population, les dépenses de soins progressent vite, comme la facture des traitements innovants. « En sept ans, les dépenses d’assurance maladie sont passées de 185 milliards à 255 milliards », pointe-t-on à Bercy.
Le gouvernement a déjà acté le doublement des franchises médicales en 2024. Non seulement sur les boîtes de médicaments, mais aussi pour une visite chez le médecin ou sur les examens médicaux, les transports sanitaires et les actes paramédicaux (kinés…). « On est le seul pays qui continue à payer 5 milliards par an pour les transports médicaux ! », s’exclame un ministre. Une manne pour les taxis en province.
Une revue de dépenses très sensible se focalise sur la prise en charge à 100% de quelque 12 millions de patients atteints d’affections longue durée (ALD). Il ne s’agit évidemment pas de remettre en cause la prise en charge de ces maladies lourdes. « On n’est pas dingue », se récrie une source au fait du dossier. L’idée serait plutôt de restreindre la prise en charge à 100% par l’assurance maladie pour les autres problèmes de santé de ces patients.
« Je veux bien qu’on ait une grande discussion sur l’aide médicale d’Etat [pour les immigrés clandestins], qui pèse 1,2 milliard, mais, le vrai sujet, c’est l’explosion des ALD qui représentent maintenant quasiment la moitié des dépenses de santé, pointe un ministre, dans un tacle à LR. On dérive lentement vers le mode de pensée du RN : éviter les vrais sujets pour aller faire un débat sur les oreilles recollées financées par l’AME. »
Pour préserver les hôpitaux mal en point, le gouvernement va aussi devoir se colleter le sujet de l’inflation des arrêts de travail. « La question des indemnités journalières et de l’absentéisme touche toute l’économie. Vous pourriez me faire remarquer que c’est un sujet qui a été soulevé il y a six mois, et vous auriez raison », reconnaît un membre du gouvernement. Bercy voulait augmenter le nombre de jours de carence non indemnisés par la Sécu, afin d’inciter les entreprises à travailler sur les conditions de travail. Devant la levée de boucliers, il avait reculé.
Avec un tel catalogue de réformes, en matière de levée de boucliers, Gabriel Attal devrait être servi. Y compris dans sa propre majorité ?
Pour préserver les hôpitaux mal en point, le gouvernement va aussi devoir se colleter le sujet de l’inflation des arrêts de travail